Aujourd'hui, les "Rouges et Blancs" semblent renaître
de leurs cendres.
Les Polonais ont en effet survolé les Eliminatoires pour
le Mondial'2002 en terminant premiers du groupe 5 de la zone Europe,
devant la Biélorussie, l'Ukraine, le Pays de Galles, la
Norvège (!) et l'Arménie. Ils ont enfin mis fin
à une longue période de disette sur le plan international,
qui date depuis la Coupe du Monde 1986 au Mexique. Quelles sont
les causes de cette résurrection? Cette jeune formation
pourra-t-elle égaler ses glorieux ancêtres de 1974
et 1982? Autant de questions auxquelles nous tenterons de répondre...
On est en 1992 à Barcelone, une ville qui accueille les
Jeux Olympiques, les premiers après la chute du Mur de
Berlin. Les footballeurs polonais créent la surprise en
arrivant jusqu'en finale de la compétition, perdant face
au pays organisateur par 2/3. Nombre de spécialistes s'accordent
alors à dire que la ballon rond a un bel avenir en Pologne,
d'autant plus que le Legia Varsovie fait un excellent parcours
en Coupe des Champions, atteignant les demi-finales. Pourtant
les années qui vont suivre ne vont pas leur donner raison.
Les Polonais, qui ne s'étaient pas qualifiés ni
pour l'Euro'88, ni pour le Mondial'90 en Italie et ni pour la
Coupe d'Europe'92, sont également absents des Coupes du
Monde aux USA et en France, ainsi que des Euro de 1996 et de 2000.
Sans compter les piètres performances des clubs nationaux
qui ne brillent pas sur le plan continental. Le football polonais
s'effondre: une véritable catastrophe! Que s'est-t-il passé?
Est-ce un phénomène faisant suite aux réformes
draconiennes menées par Balcerowicz dans le pays? Personne
ne le sait. C'est dans ces conditions de crise que Michal Listkiewicz
est nommé au poste de président du PZPN, la fédération
polonaise de football, le 28 juin 1999. Cet homme va aussitôt
s'entourer d'une armada de collaborateurs, dont Zbigniew Boniek
et Eugeniusz Kolator, et se lancer dans des restructurations qui
s'avéraient être indispensables. Une tâche
certes difficile, mais qui, petit à petit, portera leurs
fruits...
Un an plus tard, les conséquences logiques du travail mené
par le trio Listkiewicz/Boniek/Kolator se font sentir: les stades
ont été pour une bonne partie rénovés
et sont désormais aux normes de l'UEFA, les droits de retransmission
sont équitablement attribués aux chaînes de
télévision (Polsat Sport, Canal+ Polska et Wizja
Sport notamment)... Seul hic: ce bilan positif des dirigeants
du PZPN n'est pas accompagnée de succès de la part
des clubs polonais en Coupes d'Europe et surtout de l'Equipe Nationale.
Et ce, malgré le changement de sélectionneur en
début d'année 2000, Jerzy Engel ayant pris la place
du très populaire Janusz Wojcik. Le nouvel entraîneur
de la Pologne se verra même sévérement critiqué
dès sa prise de fonction, notamment après la défaite
par 3 buts à 0 face à l'Espagne. Pire: jusqu'à
la mi-juin 2000, les attaquants des "Rouges et Blancs"
ne trouveront pas une seule fois le chemin des filets! Heureusement,
les choses changèrent après l'arrivée d'un
joueur d'origine nigériane naturalisé polonais,
Emmanuel Olisadebe. Ce footballeur d'exception, qu'Engel avait
découvert alors qu'il tenait en main les destinées
du Polonia Varsovie, s'averra être la pièce maîtresse
de l'attaque de la sélection nationale. Il explosa littéralement
lors du premier match de qualification pour la Coupe du Monde
2002 organisée conjointement par le Japan et la Corée
du Sud, face à la redoutable Ukraine
de Shevchenko et de Rebrov. Il marqua deux superbes buts contribuant
ainsi à la victoire historique de ses coéquipiers
à Kiev (1/3). Il serait pourtant inexact d'affirmer que
les récents exploits de la "S-Kadra" soient uniquement
dûs au talent d"Olisadebowski". Ce serait ignorer
les rôles importants de certains joueurs, comme par exemple
Radoslaw Kaluzny. Ce solide milieu de terrain est pourtant l'auteur
d'un triplé face à la Biélorussie (3/1 à
Lodz), ce qui n'est pas à la portée de n'importe
qui! Il
ne faut pas oublier non plus le meneur de jeu, Piotr Swierczewski,
qui possède toute la confiance du sélectionneur,
ainsi que les piliers de la défense que sont Jacek Zielinski,
Tomasz Hajto, Marek Kozminski et Tomasz Waldoch (le capitaine
de l'Equipe Nationale et de Schalke 04, élu meilleur défenseur
de la Bundesliga pour la saison 2000/2001). Dans les buts, Engel
n'a que l'embarras du choix avec Jerzy Dudek (le portier de Liverpool),
Adam Matysek ou encore Jakub Wierzchowski (Werder de Brême).
Le banc de touche est également bien rempli, avec notamment
les frères Zewlakow, Tomasz Klos, Jacek Krzynowek et surtout
Bartosz Karwan, un attaquant très particulier qui a tendance
à décevoir dans le championnat polonais mais à
briller avec le Onze National. C'est lui qui marqua le but décisif
pour son pays contre la Norvège à Oslo, le 24 mars
dernier (2/3), une rencontre qui, pour beaucoup, fut la plus émouvante
depuis le match Angleterre/Pologne en 1973 qui permit à
l'extraordinaire formation des Lato, Deyna et Kasperczak de participer
à RFA'74... Non, Olisadebe n'est pas seul. Pour la première
fois depuis longtemps, la Pologne possède un groupe très
homogène, grâce à l'excellent technicien qu'est
Jerzy Engel. Il a su reconstruire la sélection et lui redonner
l'envie de vaincre. Les journaux norvégiens n'écrivaient-ils
pas avant le match remporté par les Slaves qu' " Il
y avait une époque où les équipes qui venaient
jouer au stade Ullevaal ne pouvaient que perdre, mais aujourd'hui,
les temps ont changé, et les Polonais, remontés
à bloc, ne peuvent que gagner"? Des propos d'autant
plus justes que durant le match retour, les Anges d'Engel (surnommés
aussi "Los Engeles") ne firent qu'une bouchée
de cette même formation scandinave, bouclant le match par
un score sans appel de 3/0.
Certes, la Pologne est capable de tout, du bon (4/0 face à
la Suisse et l'Arménie) et du moins bon (1/1 contre une
équipe de quatrième division allemande, VfB Oldenburg,
peu de temps avant Norvège/Pologne!),mais les faits sont
là: les "Bialo-Czerwony" ont été
les premiers Européens à se qualifier à la
Coupe du Monde 2002, le 1er octobre 2001. Et comme si cela ne
suffisait pas, Olisadebe termina second meilleur buteur de la
Zone Europe derrière l'Ukrainien Andreï Shevchenko,
une performance qui aurait pu être encore meilleure si "le
Lato Noir" avait disputé toutes les rencontres des
Eliminatoires... Espérons que les Polonais garderont ces
bonnes habitudes, en nous faisant plaisir en Asie, et pourquoi
pas, en revenant avec une belle médaille... En attendant,
nous leur souhaitons bonne chance du fond du coeur!
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Adam Zohry