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Korzeniowski: chercheur d'or à Paris

Mercredi 27 août : L’hymne polonais retentit dans l’enceinte du Stade de France. Debout, en haut de la tribune sud, une cinquantaine de supporters polonais chante, la main posée sur le cœur. Sur la plus haute marche du podium, leur idole et celle de tout un pays : Robert Korzeniowski. Le matin même, il avait brillamment remporté l’épreuve du 50 km marche en s’octroyant par la même occasion la meilleure performance mondiale, l’équivalent du record du monde pour la marche.
Petit retour en arrière sur cette journée qui restera longtemps gravée dans notre mémoire.


Pour Robert, cette journée du 27 a commencé de très bonne heure, autour de 4 heures du matin. Pour nous (Aleksandra, Lidia et moi-même) elle a commencé la veille par un voyage en TGV et ensuite par un court aperçu de Paris parcouru au pas de charge. En pensant aux 50 km qu’allait effectuer Robert le lendemain, je n’avais pas envie de me plaindre. Une seule question me taraudait l’esprit : le champion allait-il bien être au rendez-vous ?
Lors de la visite à Notre Dame de Paris, un petit cierge fut allumé pour la circonstance. De toute façon, ça ne pouvait pas faire de mal.
Et c’est ainsi, qu’après une soirée mémorable passée en compagnie de Sergueï, notre logeur d’un soir à St Denis, nous nous retrouvâmes vers 8 heures le lendemain matin sur le parcours du 50 km de ces championnats du monde d’athlétisme.

Tout de suite, les premiers concurrents passent devant nous avec dans le groupe de tête, Robert Korzeniowski.
Allez Robert ! Allez Robert !
Puis déjà un peu plus loin, arrive Denis Langlois dans son maillot de l’équipe de France.
Allez Denis ! Allez Denis !
L’inconvénient de partager deux cultures, c’est qu’il faut avoir des cordes vocales plus solides que les autres. Le sport, c’est aussi d'encourager tous les concurrents. Les Polonais que nous allons rencontrer un peu plus tard vont nous donner une belle leçon de sportivité.

Au fur et à mesure que nous avancions, les premiers drapeaux polonais font leur apparition. Il s’agit de petits groupes isolés, faisant comme nous, une petite balade le long du parcours. Un groupe de l’US Tourcoing, le club français de Robert, est également présent.
Puis, les premiers t-shirts Elite Cafe nous sautent aux yeux. Elite Cafe, c’est le principal sponsor de Robert Korzeniowski et de son groupe. Nous sommes sauvés, le fan club est bien présent dans les rues de St Denis.
Nous faisons donc connaissance avec les dirigeants de la firme qui nous indiquent tout de suite où se trouve le gros de la troupe. Robert ne marchera pas seul. Ses supporters sont là.

Pour les trouver, rien de plus facile. C’est là où il y a le plus de bruit, le plus d’applaudissements, le plus d’ambiance. Sur toute une partie de cette avenue de St Denis, le blanc et le rouge sont devenus les couleurs locales.
En deux temps trois mouvements, nous sommes happés par le groupe. Lidia se retrouve avec un t-shirt Elite Cafe spécialement crée pour ces championnats sur le dos, et moi, avec une casquette Elite, donnée gracieusement par un supporter polonais.
Robert, Robert, Robert …..
Il passe devant nous au milieu des coups de sifflets et de trompettes. Ils ne sont plus que 6 en tête. Tout va bien.

Le fan club de Robert est principalement composé par des jeunes d’une école des environs de Poznan. Le directeur nous explique que beaucoup de ces jeunes sont issus de familles modestes. Depuis longtemps, ils ont tous travaillé à ramasser des papiers, recycler des bouteilles vides afin de financer le voyage. En Pologne, rien ne tombe tout cuit dans l’assiette. Elite a bien sûr participé à l’opération. Ils ne leur manque plus qu’une seule chose maintenant, la victoire de Robert Korzeniowski.

Une clameur se lève et interrompt la discussion.
Robert, Robert, Robert …
Korzeniowski est parti. Il est maintenant seul devant, le visage marqué par l’effort, les mâchoires crispées par la volonté d’aller au bout de sa souffrance.
Un peu plus loin derrière, les Russes mènent la chasse.
Russia, Russia, Russia …
Les Polonais encouragent les Russes qui essayent de revenir sur Korzeniowski. Quelle leçon de sportivité nous donnent ces jeunes !

Germany, Germany, Germany …
Francja, Francja, Francja … pour Denis Langlois qui est autour de la 10ème place.
L’officiel qui suit le groupe à vélo a lui aussi droit à ses encouragements.
Tour de France, Tour de France …
Le sourire aux lèvres, il nous salut gentiment de la main. La bonne ambiance est au rendez-vous. Les drapeaux blanc et rouge s’agitent de plus en plus. La fièvre commence à monter.

Devant nous passe une grande dame de l’athlétisme polonais. Irena Szewinska, actuelle Présidente de la Fédération Polonaise.
Le directeur de l’école de Racot lui demande gentiment de poser avec les jeunes pour une photos souvenir. Elle tourne la tête, voit les logos Elite Cafe. Le regard devient noir, refuse et elle continue son chemin comme si nous n’existions pas.
Le conflit entre la fédération polonaise et Elite a laissé des traces. La rancœur est tenace. Ces pauvres gosses n’y sont pour rien, mais visiblement ce n’est pas son souci.


Plus que 8 tours avant la fin. Robert arrive, toujours devant. L’écart est creusé.
Bedzie zloty, Bedzie zloty, Bedzie zloty, Bedzie zloty (Il y aura de l’or)

Pour nous, il est temps de nous diriger vers le stade. Les autres vont rester pour accompagner Robert jusqu’à la fin. Ils n’ont malheureusement pas de billets pour la matinée. Ils ont peur que Robert arrive dans un stade vide et silencieux. Deux jeunes filles nous prêtent un grand drapeau polonais. On va leur rendre à la sortie, après la victoire qui pour nous est certaine. Ce drapeau a beaucoup voyagé, elles y tiennent. Il va porter chance à Robert, c’est certain.

Le Stade de France est bien garni. Nous suivons la fin de l’épreuve sur l’écran géant. Le Russe revient mais Robert va tenir. Le stade se lève d’un seul coup. Robert arrive sous les acclamations de la foule .En face de la ligne d’arrivée, nous agitons les couleurs. La ligne franchie, Robert entame son tour d’honneur. Le public est toujours debout. Hommage à un champion qui vient en plus de battre le record du monde.

Quelle matinée ! Et la journée est loin d’être terminée. Le soir, le stade va encore vibrer avec la finale du 1500 m et le duel tant attendu entre Mehdi Baala et Hicham El Guerrouj.


Pour Robert, la journée va également être longue et pénible. Si le champion est bien connu, l’homme l’est peut-être un peu moins. Sa gentillesse et sa disponibilité font qu’il ne refuse jamais rien. Et lorsque l’on vient de remporter un troisième titre mondial, les sollicitations ne manquent pas. Presse écrite, télévision, autographes … Les félicitations affluent. Le Président Kwasniewski l’appelle. La journée passe, épuisante. Il ira se coucher à 4 heures du matin sans même avoir pris le temps de manger

Mais avant, en début de soirée, la musique vino griego annonce la cérémonie protocolaire de remise des médailles pour le 50 Km marche.
Premier et médaille d’or : Robert Korzenowski., Pologne.

L’hymne polonais retentit dans l’enceinte du Stade de France. Debout, en haut de la tribune sud, une cinquantaine de supporters polonais chante, la main posée sur le cœur……

Merci Robert pour cette journée.

© Texte et photos Stéphane Delrieu
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