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Passeport Généalogique pour la Pologne

La fièvre généalogique a gagné aujourd'hui en grand nombre les petits-enfants et les arrière-petits-enfants de ces milliers d' immigrés polonais arrivés en France dans les années vingt et trente du vingtième siècle. Au fil du temps, la conscience de leurs origines particulières s'est réduite à peu de choses, et parfois, seul le nom de famille est là encore pour témoigner d'un passé déjà bien enseveli . Et voilà que l'on désire soudain refaire en sens inverse le chemin de l'ancêtre migrant, retrouver en Pologne des racines et un peu de son identité perdue , et annuler en quelque sorte symboliquement un déracinement déjà presque séculaire.

A ce désir de récupérer son histoire familiale s'opposent hélas des obstacles bien concrets : plusieurs centaines de kilomètres et quelques frontières (aujourd'hui invisibles …) , l'oubli de la langue polonaise, les idées préconçues (les guerres, les guerres, tout aurait brûlé …) ainsi que l'ignorance des portes où l'on peut frapper pour s'informer. Les guides généalogiques, qui pullulent pourtant sur le marché français, et qu'il faut évidemment connaître pour découvrir les méthodes de base de la recherche, ne disent pas grand chose sur les possibilités d' investigations en Pologne.

Aussi, le petit "Passeport pour la Pologne" que voici vous est-il proposé pour combler une lacune, pour vous aider à vous faire une conception plus précise de ce qui vous attend. Il n'a d'autre ambition que de baliser votre itinéraire et de vous éviter les impasses et la perte de temps . Il ne prétend certes pas envisager tous les problèmes ni analyser toutes les situations. Il n'entend pas explorer les territoires orientaux, autrefois polonais, actuellement ukrainiens ou biélorusses, d'au delà du Bug. Il ne s’aventure pas sur le terrain des recherches nobiliaires. Il ne se penche pas non plus sur le cas des communautés minoritaires de la Pologne, juive, protestante, orthodoxe ou autres... Tel quel, il reflète l'expérience particulière de quelqu'un qui a lui même appris sur le terrain, et dont les ancêtres appartenaient généralement à un monde paysan et catholique, plus ou moins prolétaire, sous domination prussienne au XIXe siècle et, au début du XXe siècle, contraint à l'émigration.


Les dérives à éviter au départ

1) la boulimie patronymique :

On s'en va contacter un maximum de personnes portant le même nom que soi , sous prétexte qu'il doit s'agir de cousins potentiels. Avec l'enthousiasme du néophyte, on rassemble une liste impressionnante d'individus, aux quatre coins de la Pologne et de la terre, qu'on croit pouvoir bientôt relier à un ancêtre commun. On se sent même investi de la mission sacrée de retrouver l'unité perdue de tant de branches disparates, de recomposer en majesté l'Arbre de la tribu. On fait, ou on tente de faire, la généalogie de tout ce monde. Au bout de bien des efforts, ce n'est pas un arbre que l'on a devant soi, c'est une forêt équatoriale mêlant arbres géants et arbustes nains, aux racines pourtant résolument séparées. On aura tout simplement oublié que des familles tout à fait distinctes partagent le même nom , qu'il existe des noms rares et d'autres beaucoup plus courants, et que le nom ne suffit pas en règle générale à prouver un lien de parenté.

2) le rêve nobiliaire :

Il suffit parfois d'une légende familiale incertaine et d'un suffixe en -ski accroché au bout de son nom pour s' inventer des ancêtres gentilshommes à retrouver toutes affaires cessantes et à tout prix. Or, rares sont les noms de famille spécifiquement nobles. La plupart des noms de famille dits nobles sont aussi portés par des familles paysannes ou bourgeoises. Le mythe du "-ski de noblesse" a la vie dure. Postuler un blason avant toute recherche généalogique n'a pas de sens.

3) le salut par Internet

Ne pas confondre "recherches généalogiques" et "recherches sur Internet". Même si Internet facilite le travail du généalogiste, il ne faut pas s'imaginer y trouver en quelques clics son arbre "clé en mains". Peu, très peu de familles polonaises ont jusqu'ici fait l'objet de recherches . Ne pas s'attendre à ce qu'une main invisible ait déjà dessiné votre arbre à l'avance. Partez avec l'idée que tout est à découvrir par vous-même, et appliquez d'abord la maxime " Aide-toi, Internet t'aidera".

4) le salut par la correspondance

"A quelle mairie faut-il écrire pour qu' "ils" me fassent des recherches ? ", entend-on souvent demander .
Bien sûr, le chercheur sera amené à écrire aux institutions civiles et religieuses polonaises pour obtenir ponctuellement certains actes. Mais ni les employés de l'état civil, ni les curés des paroisses, ni les archivistes n'ont pour fonction de faire à votre place des recherches que vous ne pouvez accomplir vous-même. Ne pensez pas vous décharger sur autrui d'une tâche qui vous incombe en priorité, puisque c'est vous, n'est-ce pas, qui souhaitez connaître vos origines.


La révolution des microfilms mormons

Pas de recherches généalogiques sans exploration de l'état civil , des registres laïcs ou religieux qui ont gardé la trace des naissances, mariages et décès de la population. Et là, l'Eglise de Jésus-Christ des Saints des derniers jours aura réalisé un petit miracle : rendre proche ce qui était loin, accessible au plus large public ce qui restait confiné dans les dépôts d'Archives.

Depuis l'existence du microfilm, et grâce à la politique d'ouverture des centres généalogiques mormons, les choses sont devenues assez simples pour le chercheur qui travaille hors de Pologne : les documents dont il a besoin ont-ils été microfilmés, ou non, par les mormons ? De la réponse dépendent la suite des opérations, le confort ou la galère….

Le réflexe, la règle d'or , c'est donc d'aller visiter la page "place search" , rubrique "family history catalog" du site mormon http://www.familysearch.org . Et d'y entrer le nom de la localité de notre choix. Les références des microfilms existants apparaîtront . Il n'y a plus alors qu'à contacter le centre mormon le plus proche, commander, et venir consulter sur place le gisement d'informations sous forme de bobine microfilmée.

Si on ne trouve rien sur la page "place search" , il ne faut pas incriminer forcément l'absence de microfilms. Tout simplement, la localité qui nous intéresse ne possède pas obligatoirement de clocher paroissial ou de bureau d'état civil. Ce qui veut dire que la localité dépend , sur le plan de l'enregistrement , d'une autre . Parfois, ce peut être un "challenge" délicat de déterminer quelle est cette autre localité.

En Pologne en effet , une paroisse (ou un bureau d'état civil) englobe généralement une bonne dizaine de villages et autres lieux-dits. Si l'un de vos ancêtres est né à Piaski, il ne s’ensuit pas ipso facto que Piaski soit le siège d'une paroisse. Pour compliquer davantage, certains noms de lieu ont une telle fréquence en Pologne que, si l'on ne dispose pas d'autres éléments de repérage, on encourt le risque de rester durablement bloqué . Ainsi pour Piaski, dans le seul diocèse de Poznan, il existe bien une paroisse de ce nom, mais encore cinq autres Piaski dépendant d'autant de paroisses différentes. Pour sortir du flou, on fera appel si possible à la mémoire familiale, aux contacts éventuels avec des membres de la famille restée en Pologne, ou encore, si nos ascendants sont passés par l'Allemagne avant d'émigrer en France (c'est un cas fréquent), aux actes d'état civil allemands qui ont la bonne idée de faire suivre le nom de la localité de la mention du district (Kreis) dont elle relève. Les actes français, en ce qui les concerne, ne le font pas régulièrement et, de surcroît, maltraitent fâcheusement la graphie correcte des toponymes (comme des patronymes) polonais : autant laisser à une personne avertie le soin de rétablir, si possible, l'orthographe originelle. On préférera donc systématiquement, aux transcriptions françaises volontiers farfelues, les originaux polonais ou allemands.

Chaque fois que se présentera un problème de localisation, on consultera avec profit les atlas routiers et autres cartes détaillées de la Pologne, et éventuellement les "annuaires diocésains" (même périmés) : Rocznik Diecezji N., en sollicitant éventuellement la Mission Catholique Polonaise de Paris, rue Saint Honoré. Sur Internet, certains diocèses polonais ont mis en ligne ces données, par exemple le diocèse de Kielce. http://www.kielce.opoka.org.pl/index.html
ou celui de Sandomierz http://www.sandomierz.opoka.org.pl/strdiec/parafie.php?d=99&n=11.
Pour la Posnanie, on pourra recourir à la page suivante : http://www.posen-l.com/TownSearch.php .

Le "Dictionnaire géographique du Royaume de Pologne et d'autres pays slaves", œuvre monumentale en 15 volumes, parue à la charnière du XIXe et du XXe siècles, est consultable à la Bibliothèque Polonaise, 4 rue d'Orléans à Paris : entre autres renseignements intéressants, il indique pour chaque localité même infime la paroisse dont elle relevait à la fin du XIXe siècle (Slownik geograficzny Królestwa Polskiego i innych Krajów Slowianskich, Varsovie : Sulimierski, Walewski 1880 1902). Ce Slownik devrait prochainement être disponible entièrement sous forme de Cédérom.
Voir : http://www.biblioteka.okay.pl/oferta.html .

Quand il n'y a pas de microfilms, la meilleure des solutions est de se rendre sur place.
La correspondance n'est qu'un pis-aller mais, si l'on doit écrire dans les paroisses ou les bureaux d'état civil communaux , on le fera systématiquement en polonais, en n'exigeant rien qui ne soit déraisonnable . Si l' on écrit aux dépôts d'Archives, le polonais est peut-être moins impératif, mais il ne faut pas compter trouver partout un interlocuteur apte à déchiffrer la langue de Molière . De plus, il faut savoir que les Archives des diocèses ne souhaitent pas forcément procéder aux recherches généalogiques des particuliers, faute de personnel . Les courriers risquent même de ne recevoir aucune réponse. Mais la politique est différente d'un diocèse à l'autre : Poznan par exemple répond aux demandes, mais c'est payant , tandis que Gniezno s'y refuse. De plus en plus de diocèses néanmoins ont un site internet , et il est donc possible de s'informer directement par mail de ce qui est possible. Le cas échéant, on peut demander s'il existe auprès des Archives une personne privée disponible pour des recherches payantes. Quant aux Archives d'Etat, le problème se pose en d'autres termes : elles procèdent volontiers aux recherches des particuliers, mais exigent un paiement , et leur tarif est particulièrement élevé. (voir encore le paragraphe ci-dessous)

Les registres paroissiaux

En Pologne, la base de notre information généalogique sera principalement constituée par les registres des paroisses, plutôt que par ceux de l'état civil communal .

Il faut savoir en effet qu'au XIXe siècle, dans les trois parties prussienne, autrichienne et russe de la Pologne alors éclatée, le curé de paroisse est un officier d'état civil et ses registres ont valeur officielle. Autour de 1820, en l'absence de registres spécifiques tenus par les rabbins ou les pasteurs , M. le Curé rédige dans ses propres registres les actes relatifs aux habitants juifs ou protestants de sa paroisse. Des registres d'état civil purement laïcs ne seront institués que dans la zone prussienne en 1874 ; ailleurs, il faudra attendre la restauration d'un Etat polonais indépendant, après 1918.

Dans la zone russe, dite Kongresówka, ou officiellement "Royaume de Pologne", héritière du Grand Duché de Varsovie napoléonien, les actes, rédigés en langue polonaise suivant le modèle français, sont les plus détaillés, et les registres sont pourvus de tables annuelles. Ces avantages incontestables sont compensés par le fait qu'à partir de 1868, la langue russe y supplanta le polonais : il faut alors savoir déchiffrer l'alphabet cyrillique. Heureusement, parfois, les tables ont été rédigées de manière bilingue, et l'on peut trouver aussi, dans le corps de chaque acte, la transcription en polonais du nom des intéressés. De même, les actes seront datés doublement , selon le calendrier orthodoxe (julien) et selon le calendrier grégorien (en décalage de 12 jours l'un par rapport à l'autre)

Ailleurs, c'est le latin qui domine, concurrencé cependant progressivement au cours du XIXe siècle par le polonais, mais le latin ne disparaît vraiment des registres qu'après 1945.

Pour tout ce qui est antérieur à l'époque des Partages de la Pologne (donc avant 1795), la suprématie du latin est incontestée ; épisodiquement, le polonais affleure, généralement en dehors des actes eux mêmes lorsque le curé se laisse aller à commenter les événements grands ou petits de sa paroisse.

Pour le généalogiste qui ne lit pas le polonais, cet usage dictatorial du latin est plutôt une aubaine. Les formules d'enregistrement des baptêmes, des mariages et des sépultures sont sujettes à certaines variantes mais n'ont rien d'hermétique. Il se rencontre même souvent au XIXe siècle, du moins en territoire prussien ou autrichien que les actes rédigés disparaissent au profit de simples tableaux à colonnes, ce qui facilite encore la lecture.

Quant à l'information elle même contenue dans les actes, on doit s'attendre à une certaine diversité dans un contexte général de laconisme. En principe, le XIXe siècle est quand même marqué par une amélioration appréciable de la qualité de l'information.


Prenons un quelconque acte de baptême : jusqu'aux deux premières décennies du siècle dernier, on n' y trouvera presque toujours qu'un seul nom, en l'absence du nom de jeune fille de la mère. Ce même nom de jeune fille peut très bien également ne pas être mentionné au décès d'une femme mariée ou au remariage d'une veuve (y compris dans le courant du XIXe siècle). Mais signalons aussi qu'en Galicie (Pologne du Sud-Est, rattachée à l'empire d'Autriche) , les actes de baptême du XIXème siècle se distinguent souvent par leur exceptionnelle richesse: non seulement on y indique le nom des parents du nouveau-né, mais en outre celui des grands-parents !

Regardons du côté des actes de mariage : avant 1795, rarement sera donné l'âge des conjoints. Plus grave sans doute, la filiation elle aussi est négligée, comme le lieu de naissance. La remarque vaut pareillement pour les actes de décès, et elle ne perd pas entièrement de son actualité au XIXème siècle.

De toute façon, il y a pire : une masse assez considérable d'actes est dépourvue de nom de famille. Certains actes de décès dissimulent même le prénom, surtout quand il s'agit de jeunes enfants ou de vieillards ! Ce phénomène est d'une ampleur plus ou moins tragique selon les lieux et les époques mais heureusement il s'atténue pour disparaître à l'aube du XIXe siècle.

Deux remarques encore, plus positives : d'abord, l'émergence de mentions marginales de mariages, en regard des actes de baptême, dans le dernier quart du XIXème ; ensuite, pour les actes de décès, la fréquence de certaines indications assez précieuses : la cause du décès (encore que souvent on devra se contenter d'un "morbo ignoto" ou "indeterminato" : maladie inconnue) ; le nombre et l'âge des enfants laissés par le défunt, voire une estimation de l'héritage . Par exemple, en date du 2 juin 1811, cet acte tiré des registres de Rozdrazew et concernant un dénommé Jacques, 50 ans , "komornik na Szewcowym" , paysan locataire dans la ferme des Szewc, au village de Nowawies : "Il laisse une femme Catherine et d'un premier mariage un fils François de 19 ans; et de cette Catherine 2 enfants : Victoria 6 ans et Marianne 4 ans. Il laisse une chaumière qui lui appartient en propre , un jardin et une seule vache qui lui vient de sa première femme, et une seconde vache qui, elle, est de sa femme actuelle Catherine ". D'autres fois, un pauvre bougre n'a droit, en guise d'épitaphe, qu'à une formule assez sinistre : "reliquit nihil et neminem", il ne laisse rien ni personne. A noter que les actes de la zone russe, comme en France, ne précisent jamais la cause du décès.

Une fois les caractéristiques de forme et de contenu de ces registres paroissiaux mises en évidence, la question se pose de avoir qui détient ces documents à l'heure actuelle ?

Au XIXe siècle un double de ces registres était remis à l'autorité civile. L' Etat polonais en a hérité et en dispose. Avec les registres anciens de l'Etat civil laïc, ils sont conservés dans les divers dépôts d'Archives de voïévodies. La Direction Générale des Archives d'Etat à Varsovie (NACZELNA DYREKCJA ARCHIWOW PANSTWOWYCH, ul. Dluga. skr. poczt. 00.950 WARSZAWA Pologne) a publié un "Informator" sur les collections en sa possession : Ksiegi metrykalne i stanu cywilnego w archiwum panstwowych w Polsce ( Les registres des paroisses et de l'état civil dans les Archives d'Etat en Pologne , ouvrage réédité en 2003 aux Editions DiG ) . Sur Internet , la même direction a créé un site , en polonais et en anglais, SEZAM, qui donne des renseignements sur toutes les ressources des Archives publiques polonaises, y compris les registres d'état civil (voir PRADZIAD) et qui explique aussi la procédure pour les demandes d'actes et les tarifs : http://www.archiwa.gov.pl/sezam/index.html. Ajoutons que , pour les étrangers, la possibilité de faire des recherches est conditionnée par l'autorisation préalable du directeur du dépôt d'Archives concerné.


L'Eglise quant à elle est restée propriétaire de la plupart de ses registres paroissiaux. Ceux ci ou bien sont dispersés dans les paroisses ou bien ont été déposés aux "Archives diocésaines". La Pologne compte actuellement 39 diocèses (pour 16 voïévodies) : les découpages administratifs de l'Eglise et de l'Etat s'ignorent et les chefs lieux respectifs peuvent ne pas concorder. Certains diocèses créés récemment ne doivent pas être très riches en fait d'archives anciennes : ainsi pour les paroisses du nouveau diocèse de Kalisz, les registres sont toujours soit à Poznan, soit à Gniezno ou Wloclawek. L'accès aux "Archives diocésaines" est libre ; les horaires d'ouverture, les périodes de congés (se méfier en été !) , l'organisation pratique sont variables (A Poznan, on vous demandera de payer quelques zlotys par heure de recherche, à Gniezno ce sera totalement gratuit). Il n'existe aucun ouvrage recensant l'ensemble des registres possédés par l'Eglise.
Certains diocèses , comme celui de Poznan, ont un site Internet qui renseigne sur les registres déposés aux Archives , mais pas sur ceux restés dans les paroisses. http://www.aap.poznan.pl/.

On trouvera les sites des diocèses polonais référencés à la page suivante: http://www.opoka.org.pl/struktury_kosciola/diecezje/.
Pour une carte des diocèses, voir aussi : http://www.rootsweb.com/~polwgw/dioceses.html.

Christian Michel Orpel

A suivre ....

 





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