Beskid.com
La Pologne Online

Gazet@ Beskid

barre

Votre Journal de Pologne: utile, pratique, des infos, des reportages ... Tous les mois la Pologne est sur le Net 

   
Pourquoi j'aime la Pologne

 

Belge d'origine, je vivais comme il se doit en Belgique. La Pologne ne représentant pas pour moi un pays de destination pour les vacances, je ne m'y étais jamais intéressé. Vers la fin des années 80, j'avais bien sûr entendu parler, comme tout le monde des problèmes de ce pays, ainsi que de Solidarnosc, Walesa, Jaruzelski et surtout du Pape Jean Paul II.

Tout cela, ce pays et ses habitants auraient pu continuer à vivre dans mon indifférence totale, si je n'avais rencontré au début de 1987 une jeune femme belge, mais d'origine 100% polonaise, pour qui j'ai eu ce que l'on appelle "le coup de foudre". Or, il se fait que cette jeune personne avait encore une tante en Pologne. Une sœur à sa mère vivait dans un petit village, dénommé Zawoja, perdu au milieu des Beskides. Les parents de ma compagne (tous deux Polonais) avaient été déportés par les Allemands durant la guerre. Ils n'étaient jamais rentrés dans leur pays depuis 1943 et aucun membre de la famille qu'ils avaient fondé en Belgique n'avait jamais mis les Pologne non plus. Lorsque ma compagne, me parla la première fois de la Pologne et de son désir d'aller rendre visite à sa tante, et ainsi remonter aux sources de sa famille coté maternelle, je n'ai pas hésité un seul instant à dire "oui". Pourtant, je n'avais absolument aucune attirance pour les pays de l'Est et encore moins pour des pays d'obédience communiste, comme c'était encore le cas de la Pologne à cette époque. Employé de l'Etat, dépendant de trois ministères, ce ne fut pas tout simple pour moi d'obtenir les autorisations nécessaires pour visiter un pays du bloc de l'Est. Néanmoins, début 1988, toutes les autorisations m'étaient accordées et nous avons pu planifier notre voyage pour les vacances de Pâques de la même année.

J'achetais donc une carte d'Allemagne, encore divisée en RFA et RDA à l'époque, ainsi qu'une carte de Pologne dont je ne parvenais pas à prononcer le moindre nom de ville ou village. Je traçais l'itinéraire que j'estimais à 1450 km environ. Un calcul serré de la consommation de la voiture s'avéra nécessaire pour l'achat des "bons d'essence", utiles pour le ravitaillement de la voiture en Pologne. Je passerais sur les différentes péripéties du voyage, attende de trois heures au poste frontière entre les deux Allemagnes où je commençais tout doucement à regretter ce voyage. Je ne parlerai pas non plus du nombre incalculable de fois ou l'on s'est perdu. Enfin, c'est avec une joie indéfinissable que nous avons vu le panneau indiquant la direction de "ZAWOJA", il ne précisait pas le nombre de kilomètres, mais nous savions que le but était proche.
Ma compagne, tout comme les chevaux sentant l'écurie proche, devenait de plus en plus nerveuse, à un point tel que lorsque je stoppais la voiture devant l'isba de sa tante, elle refusa de sortir. Elle m'envoya frapper à la porte. Ne parlant pas un traître mot de polonais à cette époque, je me bornais à demander "Yadwicga ?" à la petite bonne femme qui avait répondu à mon appel. La voyant hésiter sur le seuil de la porte, ma compagne est alors sortie de la voiture pour aller se jeter dans les bras sa tante. Moment émouvant s'il en est et je crois bien que tout le monde a écrasé discrètement une larme.

La Ciocia nous ayant fait entrer dans sa "maison", j'éprouvais des craintes à dormir dans cet endroit froid et humide. En effet, par souci d'économie, elle ne chauffait pas cette pièce qui lui servait principalement de chambre. Elle passait ses journées à l'étable près de sa vache, se chauffant à la douce chaleur animale. Toutefois, mes craintes s'envolèrent lorsque la Ciocia nous conduisit chez son voisin, dans une belle et grande maison où une chambre confortable et un lit douillet nous attendaient. Et c'est là que je me suis mis à aimer la Pologne et ses habitants. Malgré la relative misère qui régnait à cette époque, les gens étaient tout sourire et nous avions du mal à refuser les cadeaux qu'ils voulaient nous offrir. On ne pouvait pas dire que quelque chose était beau sans le recevoir en cadeau. La canne de montagnard (czupaga) que j'avais reçue pour avoir trouvé que c'était joli, a toujours sa place d'honneur dans mon salon. Ma compagne ayant eut le malheur de trouver jolis des verres à vin de teinte bleue, les a reçus également en cadeau. On sentait que ces personnes voulaient nous faire vraiment plaisir, que ces cadeaux étaient totalement désintéressés, chose à laquelle nous étions peu habitués dans notre mode de vie.

Ce voyage a eu sur moi plusieurs effets bénéfiques à des niveaux différents. La méthode de travail aux champs avec des chevaux, m'a dans un premier temps rajeuni, car je n'avais plus vu cela depuis ma prime jeunesse, mais m'a aussi désolé lorsque j'ai vu les efforts que ces agriculteurs devaient fournir pour tirer de maigres récoltes de leurs lopins de terre. Je me suis juré de ne plus jamais me plaindre lorsque je devrai passer la tondeuse sur ma petite pelouse, alors que ces paysans polonais fauchaient des champs entiers à la main. L'époque était aussi et surtout aux restrictions. La famille où nous logions recevait des bons de ravitaillement pour s'approvisionner en viande, bouteilles de gaz et certainement d'autres choses que je ne connais pas. Je me souviens avoir vu des files interminables, qui passaient parfois la nuit aux portes des magasins pour pouvoir, peut être, acheter l'indispensable dès l'ouverture.

Avant notre départ, certaines personnes qui avaient déjà visité la Pologne nous avaient vanté la bière polonaise. C'était paraît-il (et c'est vrai, elle est bonne) quelque chose à goûter, si on aime la bière évidemment. Me croirez-vous si je vous dis que nous avons bu notre premier verre de bière la veille de notre retour. Outre la politique, je crois que la Pologne était dirigée à cette époque surtout par deux petites phrases " nie ma" et "nie moze" (Il n'y en a pas et on ne peut pas).
Si ma petite histoire vous intéresse je pourrais, une prochaine fois, vous conter comment nous avons pu goûter, d'une façon assez particulière, une seconde fois à cette bonne bière polonaise.
(à suivre…)
Jean-Marie Van Hoorne

 



© Gazet@ Beskid
Création et réalisation Stéphane Delrieu