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Le Renseignement et la Résistance polonaise en France.

Enigma.

Les Allemands commencèrent à coder et à décoder leurs messages radio automatiquement à partir des années 1926-1928, grâce à l'utilisation d'une machine à chiffrer et à déchiffrer baptisée "Enigma'', inventée par A. Scherbius.
Les services du Renseignement polonais se rendirent compte que les Allemands utilisaient une machine à chiffrer que leurs spécialistes (cryptologues) n'arrivaient pas à décoder. Pour pallier cette lacune, un groupe de 3 éminents mathématiciens (M. Rejewski, J.Rozycki et H.Zygalski) fut alors affecté aux services du renseignement.
Le capitaine G. Bertrand, responsable de la section française de décodage, se rend à Varsovie à la suite d'une information communiquée par les services secrets polonais, informant qu'une équipe polonaise étudie la machine allemande. Une collaboration étroite s'instaure alors entre les deux services avec échange d'informations. G. Bertrand trouve dans son homologue polonais un correspondant actif et remarquable. Treize liaisons de G. Bertrand à Varsovie et des services polonais à Paris seront effectuées pour suivre l'évolution de cette recherche: la réussite fut totale. Les ingénieurs et spécialistes polonais réussirent bientôt à percer le secret d'Enigma et à lire le chiffre employé par cette machine. De plus, l'équipe polonaise parvint à construire plusieurs de ces machines Enigma.
Le 24 juillet 1939, la menace de guerre devint plus précise, le capitaine G. Bertrand, lors d'un nouveau séjour à Varsovie, reçoit de la part des services polonais deux exemplaires reconstitués de la machine Enigma. Les deux engins sont transférés à Paris par la valise diplomatique, et l'un d'eux est remis aux services britanniques de ''L'Intelligence Service''.
Malheureusement pour la Pologne, juste avant la campagne de septembre, les Allemands changèrent la clé de leur machine Enigma et les cryptologues polonais ne purent la redécouvrir à temps. Néanmoins les spécialistes polonais, réussirent à passer en Roumanie avec deux de leurs machines à chiffrer, puis en France.

A la déclaration de guerre, le capitaine Bertrand installe son service de décodage au château de Vignobles à 40 km au sud est de Paris. Il intègre dans son équipe les spécialistes polonais, ainsi qu'un officier de liaison britannique. Le 28 octobre 1939, après avoir travaillé jour et nuit, l'équipe de décodage parvient à maîtriser les modifications apportées à Enigma par l'état-major allemand. A partir de ce moment et jusqu'au 14 juin 1940, environ 5 000 dépêches allemandes sont ainsi décryptées. Les messages interceptés sont essentiellement ceux de la Luftwaffe au trafic plus volumineux que celui de la Wehrmacht qui utilisait un réseau télétype-fil échappant à l'interception.

Après l'armistice de juin 1940, les ingénieurs polonais poursuivirent leur travail avec les services du renseignement du capitaine Bertrand en zone libre jusqu'à l'occupation de la zone Sud par l'armée allemande. Après cette date, l'équipe polonaise gagna clandestinement Londres par l'Espagne, pour utiliser la machine Enigma au service des Anglais.
Après juin 1940, les Britanniques redoublèrent d'efforts en créant près de Londres un centre de cryptologues où l'on rebâtit un système appelé ''Ultra'' fondé sur la machine Enigma. Le rôle joué par ''Ultra'' fut énorme et permit aux Alliés de déchiffrer les opérations allemandes, notamment pendant la Bataille d'Angleterre de 1940, ou lors du débarquement de 1944 en Normandie. Selon le président Churchill, ''Ultra'' constituait la source miracle, et pour le général Eisenhower son rôle était souvent décisif dans la conduite de la guerre.(13) (22).

( La machine Enigma virtuelle )

Le réseau F2. (19)

En juillet 1940, trois officiers polonais récemment démobilisés par le centre de démobilisation de Toulouse, et membres d’une organisation polonaise d’évacuation de soldats vers Gibraltar via l'Espagne, se rendirent compte de l’importance énorme que représenterait leur organisation sur les arrières de l’ennemi dans le domaine du renseignement. Ces anciens officiers du renseignement polonais, le Cdt Zarembski, pseudonyme "Tudor", le Cdt Slowikowski "Ptak" et le Cdt Czerniawski "Armand", de leur propre initiative, sans ordre, et sans argent, rassemblèrent autour d’eux un groupe de volontaires polonais et français. Ils construisirent leur propre poste radio et le 22 août établirent de Toulouse, un premier contact radio avec Londres. La première cellule d'un réseau de Résistance Polonais venait d’être créée en France....
Le 6 septembre 1940, Londres décida d’envoyer en France le capitaine de corvette Tadeusz Jekiel, pseudonyme ‘’Doctor’’, délégué par la Marine polonaise, pour organiser le renseignement maritime et de transmettre au Cdt Zarembski, la responsabilité de ce réseau. Ce réseau fut appelé ''F2'', ''F'' pour France et ''2'' car le mouvement succédait à une organisation de renseignement des forces navales polonaises.
Dès lors, les responsables polonais du réseau oeuvrèrent pour étendre leur action à l'ensemble de l'hexagone. Dans ce but, ils cherchèrent très tôt à impliquer dans leur lutte le maximum d'officiers et de citoyens français. Leur politique de recrutement se basait sur l'argumentaire suivant:
- devant l'envahisseur, les différences de nationalité et d'opinions disparaissent, seul l'ennemi commun importe,
- en 1940, ''F2'' était, en France, pratiquement le seul réseau organisé, qui pouvait communiquer avec Londres, et qui proposait une opportunité de lutte contre l'envahisseur à des individus remarquables,
- ''F2'' étant organisé par des Polonais, les volontaires étaient ainsi convaincus dès le départ, que la seule politique menée par le réseau serait celle de nuire le plus possible à l'ennemi.

Les premiers rapports et dépêches expédiés par le réseau partirent de Toulouse pour Londres le 15 septembre! En décembre 1940, avec 200 résistants, le réseau était pleinement opérationnel et organisé en cinq secteurs, rattachés à un centre de pilotage et de coordination.

1-secteur Toulouse: responsable ''Rab'' (S. Szymanowski). Ses agents contrôlent les régions Toulousaine et des Pyrénées. ''Rab'' possède un poste radio autonome.

2-secteur Lyon: responsable ''Franta'' (M Kamienski), dont les agents contrôlent tout la région Lyonnaise.

3-secteur Aviation implanté à Lyon: responsable ''Panhard'' (W.Krzyzanowski) avec comme spécialité le renseignement concernant l'aviation, les mouvements des divisions allemandes, et l'organisation des passages au travers de la ligne de démarcation.

4-secteur Marine, implanté à Nice: avec ''Doktor'' comme responsable (T.Jekiel) assisté de ''Jean Bol'' (L.Sliwinski). Centre spécialisé dans la surveillance des bateaux ennemis, des arsenaux des chantiers maritimes et des diplomates. Sont ainsi surveillés les ports de:
. Marseille avec "François'' (F.Horowicz), ''Gynécologue'' (S.Fuchs), et ''Claude'' (Toussaint Raffini),
. Toulon par ''Fock'' (Gaston Havard) et ''Volta'' (André Brun),
. Brest avec ''Edwin'' (Gilbert Foury),
. Bordeaux avec ''Ervin''.
Au secteur Marine est également attaché une antenne de renseignements politiques et économiques à Vichy, avec comme responsable ''Callixt'' (W.Potocki). Cette cellule maintient des contacts avec les diplomates des pays neutres et surveille l'activité des diplomates allemands.

5-centre de Paris: avec ''Armand'' (M. Czerniawski), dont les premiers rapports arrivent à Marseille le 20 novembre 1940. Le 15 mai 1941, ''Armand'' réussit de Paris sa première liaison radio avec Londres et parvient à construire 5 émetteurs radios qu'il implantera dans la banlieue parisienne...
Le centre de coordination est installé à Marseille sous l'autorité du chef du réseau ''Tudor'' (Cdt Zarembski). C'est là qu'arrivent tous les rapports bi-hebdomadaires des secteurs spécialisés. ''Tudor'' travaille avec ''l'équipe 300'' constituée de cryptologues polonais, passés en zone libre, spécialistes du déchiffrage des messages radio de l'armée allemande (Enigma).

Jusqu'en 1941, les rapports gagnèrent Londres en transitant par la Suisse. Ultérieurement ils transitèrent par la Légation des USA à Vichy, ensuite par Gibraltar et à nouveau par la Suisse.
La liaison par Gibraltar s'effectue, en 1942, à l'aide d'un petit bateau de la marine de guerre polonaise (commandé par le Lt Buchowski) venant une fois par mois procéder aux enlèvements des rapports et des hommes ''brûlés''. L'opération se déroulait de nuit entre St Raphaël et Cannes.
Les rapports sont rédigés après une analyse critique. Une synthèse est ensuite élaborée et dactylographiée. Les pages de la synthèse sont microphotographiées en deux exemplaires et l'original dactylographié est détruit. Les premiers rapports étaient constitués de 150 à 800 pages...
Malgré les rafles, les traques, les arrestations, les déportations et les exécutions, le réseau réussit à maintenir son organisation et à subsister tout en étant actif jusqu'à la fin du conflit... ce qui est déjà exceptionnel en soi. Si un résistant de la première heure était ''brûlé'' ou exécuté, un autre résistant se levait aussitôt et se déclarait volontaire pour continuer la mission du disparu. C'est ainsi que l'on assista progressivement au remplacement des Polonais par des combattants français. Ce processus s'amplifia après l'occupation de la zone libre, car Londres recommandait de ne laisser aux postes à responsabilité que des ''Polonais pouvant passer pour des Français''. Le nombre relatif de Polonais et de Français du réseau changea progressivement, mais ses objectifs et les principes appliqués restèrent les mêmes.
A la fin de 1941, sur 250 Résistants du réseau, 40 étaient Polonais et à l'avènement de la Libération, la grande majorité des 2800 combattants de l'ombre étaient Français.
Le réseau ne cessa de s'étendre pour finalement couvrir tout l'hexagone. Des ramifications furent constituées vers l'Italie, l'Afrique du Nord, la Belgique et la Hollande. Pour traiter d'un sujet de l'importance de F2, il serait nécessaire de lui consacrer un ouvrage entier. Néanmoins l'on peut citer quelques exemples de sa contribution:
- dès 1941, le réseau attira l'attention de Londres sur la probabilité d'une intervention allemande en Afrique, grâce au signalement du transport d'unités blindées en Italie et de l'existence de camps d'entraînement en Prusse pour la guerre du désert. En février, l'observation du port de Naples permet d'établir le départ des premières unités de l'armée Rommel pour l'Afrique. Le paquebot ''Monte Rosa'', signalé par message radio fut torpillé, ce qui coûta la vie à 7.000 soldats allemands.
- le réseau transmit aux Alliés les structures et les emplacements du système de fortification du mur de l'Atlantique.
- il réalisa le suivi du trafic des bâtiments de guerre ennemis dans les ports de la Méditerranée et de l'Atlantique. Aucun U-boat ne pouvait entrer ni sortir d'un port sans être enregistré, ainsi que ses motifs de réparation et durée d'immobilisation dans les arsenaux.
- il fit l'analyse des résultats des bombardements d'arsenaux et d'usines d'armements.
- il situa un grand nombre de lieux de construction des rampes de lancement des bombes volantes contribuant ainsi à leur destruction.
- il localisa l'implantation de la défense aérienne sur l'ensemble du territoire français.

Malheureusement, le réseau F2 paya un lourd tribut pour ces résultats. 294 Résistants furent mis hors de combat dont: 85 morts, 151 déportés et 58 internés.

Un autre réseau polonais du Renseignement fut crée à Alger par M Rygor Slowikowski. Les informations envoyées par ce réseau au gouvernement polonais de Londres et transmises aux Anglo-Saxons furent très utiles pour l'organisation du débarquement des Alliés de 1942 en Afrique du Nord.

Le réseau polonais P.O.W.N. (15) (16) (17) (22)

Dès son installation à Londres, le gouvernement polonais en exil s'engage dans la lutte clandestine sur le continent européen. Le moteur en est la contribution active des citoyens polonais qui y résident à résister contre l'envahisseur.
Le 19 novembre 1940, il met en place une organisation spéciale, appelée ''Bureau d'action continentale'', chargée de préparer et de diriger la lutte clandestine. Le responsable de cette organisation de Résistance est M. Jan Librach, ancien attaché de l'ambassade polonaise à Paris, qui bénéficiera à partir de janvier 1941 de l'appui et de l'aide financière du gouvernement britannique. Pour l'Europe occidentale, des antennes furent très vite créées au Portugal, en Hongrie, en Roumanie, en Italie, en Turquie, en Suède au Danemark et en France. La lutte clandestine de France fut bientôt la plus importante en nombre de participants car elle a pu puiser des militants parmi les quelque 450.000 Polonais qui résidaient là, et dans la partie de l'armée polonaise qui fut démobilisée après l'armistice de juin 1940.
En mars 1940, A. Kawalkowski, ancien consul de Lille, réfugié en zone Sud, élabora un projet d'action coordonnée entre Londres et un groupe local d'officiers polonais démobilisés. L'impossibilité d'évacuer toute l'armée polonaise reconstituée en France vers l'Angleterre, explique la présence en zone Sud d'un nombre important d'officiers, de sous-officiers et de soldats. Ces hommes furent naturellement portés à la poursuite de la lutte, lorsqu'ils pouvaient échapper aux camps de travail du régime de Vichy. Ce mouvement, qui prend en 1941 le nom de P.O.W.N ''Polska Organizacja Walki o Niepodleglosc'' (Organisation polonaise de lutte pour l'indépendance), s'implante en zone sud à Lyon, et à Grenoble. A.Kawalkowski est reconnu par Londres comme chef de ce réseau implanté en France sous le pseudonyme de ''Justyn'', et reçoit ses ordres du gouvernement polonais en exil. Les objectifs assignés au P.O.W.N sont ainsi résumés:
- organiser la résistance partout où se trouvaient des Polonais,
- exécuter des opérations de sabotage,
- faire de la propagande anti-allemande,
- organiser les services du Renseignements,
- préparer la mobilisation des Polonais de France,
- collaborer avec la Résistance française en remplissant le rôle d'alliée, comme l'armée polonaise de Londres remplit ce rôle à l'égard des Forces Françaises Libres à l'extérieur de la France.

Le P.O.W.N. collabora très vite avec le réseau ''F2''. Au début de 1942 ''Justyn'' cherchant à accroître l'efficacité de son organisation, réussit à s'implanter en zone occupée. Plusieurs de ses hommes dont R.Szczesny ''Paul'' et T.Paczkowski ''Lubicz'' nouèrent des contacts fructueux avec les Polonais immigrés dans les bassins miniers du Nord, de la Belgique et de la Hollande. ''Lubicz'' et ''Paul'' réussirent à fédérer dans leur lutte le groupe ''Zorza'', (l'aurore). Ce groupe de résistants polonais s'était constitué dès la fin de 1940 d'une façon spontanée. Il recrutait parmi les mineurs polonais et les animateurs sociaux des cités minières. Le groupe qui se constituait déjà de 400 ouvriers mineurs, répartis en 80 cellules, adhère dans sa totalité au P.O.W.N. Ses responsables L.Baron ''André'' et J.Ostrowski, vont poursuivre le recrutement pour le P.O.W.N. étant informés, mais sans le connaître, que ''Justyn'' est mandaté par Londres.
En 1943, les responsables du mouvement s'installent à Paris. L'organisation se renforce avec l'arrivée du Colonel A.Zdrojewski, ''Daniel'' envoyé par le ministère polonais de la Défense, comme responsable militaire du mouvement et rattaché à ''Justyn''.
Le P.O.W.N est un mouvement dont le but ultime est de délivrer la Pologne du joug nazi, but dont la libération de la France est la première étape. De 1941 à 1943, le P.O.W.N travaille sur lui-même, se prépare et se renforce en ne cherchant pas particulièrement à établir des liens avec les réseaux français pour plusieurs raisons:
- il est important de montrer ce dont sont capables des Polonais sur une terre étrangère en combattant seuls. L'atavisme joue, car depuis le 18ème siècle, les Polonais ont appris à vivre sous une loi étrangère et à lutter pour leur indépendance. Le sentiment patriotique national est très puissant chez les immigrés, il est mobilisateur et il aplanit les divergences politiques.
- les Polonais du Nord reproduisent leur environnement social et ethnique d'avant guerre, dans lequel les populations de travailleurs immigrés ne se mélangeaient pas aux populations françaises et réciproquement.
- le P.O.W.N. est une organisation militaire, une partie de l'armée polonaise de Londres. Ses combattants obéissent à leurs chefs, comme ils avaient obéi à leurs officiers de l'armée polonaise reconstituée sur les fronts de Narvik, de Lorraine ou du Jura.
L'organisation procéda dès le début à l 'émission de 4 journaux clandestins qui jouèrent un rôle considérable pour la menée de sa lutte. ''Walka'' (combat) en automne 1941, presque aussitôt pour la zone sud ''Komunikat'' (Communiqué), puis ''Sztandar" (l'étendart) au printemps 1942, enfin à Paris ''Wyzwolenie'' (Libération) au printemps 1944.

Très tôt le P.O.W.N. se voit assigné un plan d'actions militaires conçu par le haut commandement allié en accord avec le gouvernement polonais de Londres. Dans la perspective d'un débarquement, sont prévus différentes actions par secteurs qui tiendraient compte de l'évolution des combats. Plans appelés notamment ''Bardsea'', ''Monica'', nécessitant la mobilisation instantanée de 5 à 600 combattants. Ces plans prévoyaient la destruction de voies ferrées, de ponts, et de réseaux de communication, afin de paralyser les déplacements des troupes ennemies. Le P.O.W.N. ayant le potentiel et la capacité de cette mobilisation , s'est vu assigner ces missions: il devrait collaborer avec les détachements polonais parachutés, en harcelant l'ennemi sur ses arrières (renseignements, sabotages, et lutte armée).
En 1943, la stratégie de combat de l'organisation s'infléchit en fonction des nécessités de l'heure et une action concertée est décidée avec les réseaux français de la Résistance. Cette année là, des rencontres entre ''Justyn'' et Georges Bidault avaient abouti, le 28 mai 1944 à la signature d'un accord de coopération militaire entre le général de brigade Chaban-Delmas - Délégué Militaire National - et le Colonel ''Daniel'' pour le P.O.W.N. Cet accord stipulait que:

- les détachements militaires polonais s'intègreraient dans les forces françaises de l'intérieur (F.F.I.) en conservant leur commandement propre.
- ces détachements entraient dans le dispositif général des F.F.I. et à ce titre étaient soumis au commandement tactique français.
- après l'arrêt des combats victorieux, les combattants polonais des unités de F.F.I. seraient remis à la disposition du chef militaire des Forces polonaises en France.
A partir de ce moment, les militants polonais se rapprochèrent de leurs camarades français, et contribuèrent ainsi à créer des liens entre les communautés. Les unités secrètes polonaises entrèrent dans la lutte ouverte sur tout l'hexagone, avec l'implication de 14 bataillons de combat dont 3 batteries. Dans la zone Sud, les maquis français accueillent les combattants polonais du P.O.W.N. trop dispersés pour pouvoir lutter seuls. Ceux-ci se groupent en unités placées sous commandement français, et se nomment "Compagnies de Varsovie, de Silésie etc...". Il est difficile d'établir un bilan exhaustif des actions du mouvement polonais dont de nombreuses furent menées en collaboration avec la Résistance française. Néanmoins on peut préciser quelques unes de leurs réalisations ainsi que des unités qui s'illustrèrent particulièrement:
- plus de 300 actions de sabotage furent réalisées par eux.
- le bataillon polonais "Lvov" mena le combat en Corrèze et dans le Cantal, et fut honoré de la Croix de Guerre pour son courage.
- en juin 1944 dans le Vercors, les Polonais du bataillon de "Varsovie" se battent, dont des militaires parachutés par Londres, dans les rangs des maquisards. Les 20 et 21 juillet, les Allemands lancent une vaste opération où les Résistants succombent sous le nombre. Parmi les victimes se trouvent des élèves et des professeurs du Lycée polonais des Batignolles à Paris.
- en Haute Savoie, des Polonais enrôlés de force dans la Wehrmacht, et qui furent constitués en unités secrètes par le P.O.W.N., enlèvent aux Allemands le meilleur matériel de guerre, neutralisent tous les nids de mitrailleuses et de batteries qui retardent l'avance des troupes françaises venant de Provence.
- des bataillons de Polonais en Côte d'Or et en Haute Loire furent récompensés de la Croix de Guerre pour leurs actions.
- dans le Pas de Calais, des bataillons polonais détruisent un train blindé, des chars et des engins blindés, capturent un grand nombre de prisonniers.
- dans la lutte contre les V1 et V2, le P.O.W.N. localise les rampes de lancement, permettant ainsi leur destruction par la RAF. A la tête de ce service de renseignement s'illustra le Lieutenant W. Wazny ''Tigre'', un ancien de l'armée polonaise en France, en permettant la destruction de 127 rampes en deux mois. Repéré le 19 août 1944, il fut abattu par les Allemands, alors qu'il tentait de s'échapper.
- en août 1944, dès le début de l'insurrection parisienne, un détachement du P.OW.N, fort de 300 hommes en armes, et commandé par le Lieutenant Jagoszewski, dresse des barricades, lutte dans le quartier du Marais, oeuvrant à la libération du 4ème arrondissement. Un autre détachement attaque le ministère de la Marine aux côtés des F.F.I. On ne peut tout énumérer, mais on peut affirmer que l'effort de combat du P.O.W.N. sous l'autorité dynamique du colonel ''Daniel'' fut considérable.(16)

Les effectifs des combattants du P.O.W.N à l'avènement du Débarquement s'élevaient à 8.000 hommes. Le groupe Nord comprenait: 1.000 membres au 31-12-1942, 3.000 membres au 31-12-1943, 5.000 membres au 6-06-1944. Il constituait donc la majeure partie des combattants de l'organisation. Il est à noter également que dans les familles de mineurs, l'épouse ou la fille oeuvrait comme agent de liaison, ce qui, en termes statistiques devrait gonfler fortement ces chiffres.
Après le débarquement, le P.O.W.N vit ses effectifs grossir d'une façon spectaculaire. 4.000 d'entre-eux rejoignirent la 1re Armée française.
La mention des actions du P.O.W.N. est faite dans un aide-mémoire daté du 12 juin 1944, écrit à Londres et conservé dans les archives de la France Libre. Cet aide-mémoire, confirme que le gouvernement polonais de Londres prit dès la fin de 1940 des dispositions pour qu'une organisation secrète soit formée au sein de la population polonaise en France. Il précise aussi que ''cette organisation fut créée au début de 1941 dans des buts identiques à ceux du mouvement de la Résistance française organisée par le général de Gaulle''.

La Milice patriotique polonaise.

Vers la fin de l'année 1941, des Polonais s'impliquèrent dans le cadre des ''Francs-tireurs et partisans"" (F.T.P.). Leurs unités étaient dirigées par le commandement central de la M.O.I (Main d 'Oeuvre Immigrée).
En avril 1944, les dirigeants communistes des organisations polonaises en France, créèrent la "Milice patriotique polonaise". Cette création était en liaison avec celle du "Comité de libération nationale'' (P.K.W.N.), mis en place en Pologne à Lublin par la Russie soviétique.
La stratégie de la Résistance communiste polonaise en France consistait à entraîner derrière elle la population immigrée contre l'Allemagne nazie en la faisant aussi adhérer à la mise en place d'une démocratie populaire en Pologne. Cette stratégie cherchait également à contrebalancer l'influence du P.O.W.N., qui était pro-londonienne, et hostile à cette idée.
On peut également citer quelques unes des actions exemplaires menées par les Polonais impliqués dans le cadre des réseaux de combat des F.T.P.:
- le colonel Gilles, commande les F.T.P. de la région parisienne; ce pseudonyme est celui d'un Polonais, Jozef Epstein, qui multiplie en 1943 les actions contre l'ennemi grâce à sa tactique des attentats en ville au moyen de forts détachements. Capturé, il est fusillé au Mont-Valérien.
- en septembre 1944, un bataillon de F.T.P. polonais participe avec bravoure à la bataille d'Autun. D'autres F.T.P.-M.O.I., luttent pour la libération d'Albi. (15) (16) (17) (22)

Le Mouvement de Résistance des forces armées polonaises.(15)

De nombreux militaires polonais qui n'avaient pas pu gagner Londres en juin 1940 et qui avaient été démobilisés en zone Sud, furent internés par les autorités de Vichy, et constitués en ''Compagnies de travail''. Plusieurs milliers se sont structurés en organisation autonome de résistance sous l'autorité du général Kleeberg. Dans l'attente de l'avènement d'un débarquement, ils pratiquent l'instruction militaire, organisent des passages à travers les Pyrénées pour Gibraltar et gardent le contact avec le général Sikorski à Londres en lui transmettant des informations. Après l'occupation de la zone sud, ce groupe passe dans la clandestinité et rejoint en 1944 les rangs du P.O.W.N.(15)

Combien étaient-ils?

Les principales structures de résistance dans lesquelles des Polonais s'impliquèrent peuvent être ainsi énumérées:
- les Forces armées polonaises en France,
- l'Action continentale, en charge de l'évacuation des soldats polonais vers l'Angleterre, qui fonctionna jusqu'à la Libération,
- le P.O.W.N.,
- les réseaux de renseignements mis sur pied à l'initiative du 2ème bureau de l'état-major polonais à Londres avec les réseaux "F" et "F2" et "Afrique du Nord",
- la Milice patriotique polonaise.
Janine Ponty dans son étude, dénombre 18.000 Résistants actifs à l'avènement du Débarquement. Soit un ratio d'implication des Polonais dans la Résistance de 4% (sur 450.000 Polonais établis en France). Ce qui est impressionnant. (15)
Après le débarquement des Alliés en Normandie, toutes les organisations de Résistance polonaises, lancèrent dans le combat tous leurs effectifs, grossis alors considérablement par de nouveaux volontaires. Différents auteurs dont K.Bartosek (15) et T.Wyrwa (22), effectuèrent des estimations dont il ressort un éventail de 30 à 50.000 Polonais impliqués dans les combats pour la libération de la France. Durant toute la durée du conflit, un grand nombre de Résistants polonais tomberont au combat, ou seront déportés. Perte de 5.000 hommes…

Les 20 et 21 octobre 1995, fut organisé à Paris un colloque consacré à la Résistance polonaise durant la Deuxième Guerre mondiale, sous la présidence de M. J.Chaban-Delmas et de M J.Lukaszewski, ambassadeur de Pologne en France. Colloque organisé à l'occasion du 50ème anniversaire de la Victoire de 1945, par la Société Historique et Littéraire polonaise de Paris.

Jean Medrala





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