Zakopane….
La capitale de l’hiver polonais, un petit village, somme toute,
niché au fin fond des Tatra…. Zakopane, le nom vient
du verbe « zakopac », soit enterrer, couvrir de terre,
Zakopane veut donc dire « enterré », dans le
sens difficile d’accès.
En effet, faut s’accrocher pour y arriver.
Le village se trouve à une heure de Cracovie,
quand tout va bien, par l’unique petite route à deux
voies…… Le moindre incident sur cette voie, heureusement
en cours de rénovation, peut avoir pour conséquence
des heures d’attente et d’embouteillage.
J’ai décidé un jour de montrer
cette contrée à ma famille, mon mari français
et mes deux grands enfants franco-polonais.
Je ne vais pas vous faire un guide touristique
ici, notre ami Marek le fait bien mieux que moi, je suis là
pour vous raconter des aventures plutôt drôles, quelques
anecdotes, somme toute.
J’avais déjà fait plusieurs
courts séjours dans la perle des Carpates, y compris durant
les années où j’ai vécu en Pologne, ça
avait toujours été un endroit à la mode en
Pologne, notamment pour un certain nombre de personnes qui louaient
des skis, prenaient le train pour Zakopane, faisaient plusieurs
tours de la ville les skis sur l’épaule, l’histoire
de bien se faire voir, reprenaient le train, satisfaits d’avoir
été remarqués sur place…. Ajoutons qu’ils
ne skiaient pas, pour la simple raison qu’ils ne le savaient
pas….
Enfin, Orangina (lire ma fille Marylor) et moi,
nous avions fait des repérages au cours de notre cours séjour
à Zakopane au mois de février. Après une courte
réflexion, nous avions donc décidé que l’endroit
valait la peine d’être montré à nos deux
hommes : le papa et le frangin. La décision de passer quelques
jours dans les Tatras en été a donc été
prise. Mon frère Marian, sur place, s’est chargé
de réserver une pension de famille pour nous tous, à
savoir ma petite famille, ainsi qu’une partie de celle de
mon frère….
Nous étions donc 8 à prendre le chemin
des Tatras un beau jour d’août, quelque peu couvert,
tout de même…. Le
voyage
s’est passé sans encombres, nous ne nous sommes même
pas perdus…. En fait nous avons suivi la voiture de mon frère,
qui, traditionnellement, se perd tout le temps….. Pas cette
fois, heureusement, parce qu’à peine arrivés
dans notre pension de famille, nous avons vu éclater un orage
mémorable, un vrai déluge de pluie et de grêle….
J’étais désespérée à l’idée
d’être obligée de rester enfermée durant
ces quelques jours dans la maison, à cause du mauvais temps.
Mais le temps change vite en montage et nous avons à peine
eu le temps de nous installer que le soleil ressortait. Notre pension
s’est avéré un endroit fort agréable,
située au pied d’un ruisseau de montagne, dans un jardin
coloré et plein de fleurs et autres végétaux.
Pour
la circonstance, nous avons garé nos voitures au fin fond
de la cour de la pension, elles n’en ont pas bougé
durant tout le séjour. Nous avons loué les services
d’un chauffeur équipé d’un minibus VW
8 places, qui nous amenait où nous voulions et venait nous
chercher sur simple appel…..Le programme ? Simple : un maximum
de choses en un minimum de temps…. A commencer par un petit
tour par la ville de Zakopane. Je ne me souvenais plus qu’il
y avait autant de monde, autant de boutiques, autant de cafés,
restaurants, animations de rues.
Bref,
il ne suffit pas d’une journée pour faire le tour de
la somme toute petite rue principale : Krupowki – un
enchantement, avec des groupes folkloriques, cracheurs de feu, statues
vivantes, marchands ambulants à chaque pas. On en prend plein
les yeux, plein le nez, plein les oreilles…. Eh puis c’est
un vrai paradis pour les marchands de souvenirs.
S’il fait froid, et on n’a pas besoin d’être
en hiver pour ça, arrêtez-vous donc dans un de ces
merveilleux cafés-restaurants, il y en a à chaque
pas, les uns plus pittoresques que les autres. On vous y servira
la spécialité locale : herbata goralska, soit thé
montagnard, le thé relevé d’une bonne dose de
spirytus (l’esprit d’alcool), qui titre à la
bagatelle de 95 °, les âmes sensibles pourront à
défaut s’essayer avec une version light, par exemple
relevé de wisniowka (vodka à la griotte), plus racé,
plus léger (la wisniowka ne titre qu’à 40°
!!!).
Je
vous rassure tout de même, il y a toujours la possibilité
de commander un thé, vous voyez ce que je veux dire, un simple
thé, au thé, éventuellement avec le sucre et
le citron, mais dans ce cas-là , je ne vois pas l’utilité
de faire autant de kilomètres pour boire ce qui est buvable
dans n’importe quel troquet du monde.
A défaut vous pourrez y consommer une simple bière
ou, pourquoi pas, cette même bière en version chaude.
Eh oui, on vous la chauffera votre bière si vous le désirez
et je peux vous assurer que le remède est excellent, surtout
par une froide et humide journée d’hiver (ça
arrive même en été, des journées froides
et humides).
Et surtout faites le plein de souvenirs : des bijoux en argent,
pour tous les goûts et à tous les prix, ambres et autres
pierres semi-précieuses, des vêtements en peau et laine
de mouton, faits maison, les pantoufles et mules en peau et fourrures,
des objets en bois, des fromages, dont le célèbre
oscypek, miel de montagne…. Extraordinaire…. Surtout,
n’achetez rien tout de suite, faites un tour et vous trouverez
la même chose moins cher plus loin….
Le
porte-monnaie bien allégé, le gosier et estomac remplis,
nous voilà prêts pour affronter la montagne. Méfiez-vous
de ceux qui vous diront que les petites promenades dans les
Tatras ce n’est rien du tout. Equipez-vous ! Ne faites pas
comme certains qui affrontent Morskie Oko avec les chaussures à
talons hauts, comme votre « serviteuse ». Ce n’est
pas une promenade de santé, 8 à 9 km de bonne marche
pour atteindre ce site merveilleux qu’est le lac de Morskie
Oko. Pour ceux qui, comme moi, n’affichent pas une forme olympique,
il est toujours possible de faire le trajet en calèche. Mais
la promenade en vaut la chandelle, le site est vraiment merveilleux,
extraordinairement préservé.
En tout cas, au cours de nos pérégrinations,
effectuées avec notre « busik » de location,
notre chauffeur nous a gentiment amenés rendre visite à
un « baca », et pas n’importe quel baca, je vous
prie…. Certains d’entre vous me poseront la question
: qu’est-ce donc un « baca ». Comment, vous ne
savez pas ça, répondrais-je si j’étais
de mauvaise foi…. Mais depuis le temps vous me connaissez…,
je ne suis pas de mauvaise foi, donc je vais vous le dire. Je veux
bien croire qu’il en existe encore, parmi nos lecteurs, un
certain nombre qui ne savent pas ce que le mot « baca »
veut dire….
En
fait, ça veut dire quoi au juste ? Je ne connais pas la définition
exacte, mais je vous dirai que c’est un montagnard, polonais
obligatoirement, des Tatras de préférence, un berger
qui s’occupe de son troupeau de brebis et qui fabrique ce
chef d’œuvre de la cuisine polonaise qu’est le
fromage qu’on appelle oscypek. En belle saison d’été,
baca rejoint donc les vastes prairies, vit en compagnie de son troupeau
dans la petite cabane, appelée « bacowka ». Notre
baca à nous a eu les honneurs de la télé polonaise,
son fromage a été jugé et loué à
la télévision, donc nous y sommes rendus en toute
connaissance de cause en vue de faire acquisition de cette merveille
locale.
Notre hôte nous a proposé la dégustation
du caillé de brebis, vous savez, le lait tout fraîchement
caillé dans un tonneau de bois, un peu aigre, mais encore
un peu doux. Bien entendu, mon Français de mari, ainsi que
mes deux grands enfants ont catégoriquement refusé
de porter ce nectar à la bouche. Nous n’étions
que trois braves à oser goûter
le breuvage, mon frère, ma cousine et moi-même. Je
ne sais pas si c’est le breuvage, si c’est autre chose,
mais le brave baca s’est un peu intéressé à
ma petite personne. Bref, il a exprimé le souhait de m’acquérir
; vous vous rendez compte, c’est mon propre mari qui a lancé
les enchères, en proposant, en échange de ma personne,
que le baca lui cède 4 brebis de son troupeau. Le brave montagnard,
estimant que je valais bien plus que cela, en a proposé 5
immédiatement. Par ailleurs, il a aussitôt ajouté
que s’il me voulait, ce n’était pas pour travailler,
mais uniquement pour la décoration (comment a-t-il fait pour
deviner que j’étais nulle dans le travail ???). Heureusement,
mon cher mari s’est aussitôt rendu compte que les brebis
ne savaient ni faire la cuisine, ni repasser les chemises, donc
il m’a gentiment ramenée à la maison….
Mais tout de même, je l’ai échappé belle
….
Nous sommes tout de même partis munis de
quelques oscypek maison.
En
tout cas, nous avons bien profité de notre séjour
dans les Tatras, il y en a même qui se sont essayés
à conduire le radeau sur le Dunajec, n’est-ce pas Raymi
? Heureusement que le vrai flisak n’était pas bien
loin.
La montagne est belle, celle de la Pologne n’est pas plus
belle que celle d’ailleurs, elle n’est peut être
même pas différente. Elle a son style, son charme,
son cachet. Et elle est d’abord et surtout préservée,
elle se mérite….
Allez donc la voir et dites-nous ce que vous en
pensez…. Je suis sûre que vous ne serez pas déçus….
Sabine Raffin
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