Jacek
Malczewski (1854 – 1929) est incontestablement un des plus
grands représentants du modernisme polonais. Il est le
co-créateur du mouvement de la Jeune Pologne et du symbolisme
à la manière polonaise.
Dès l’enfance, son père Julian a transmis
au futur artiste le goût pour l’histoire et la littérature
romantique et surtout pour l’œuvre de Juliusz Slowacki.
La bible, la mythologie et les livres étaient les composants
de l’atmosphère régnant dans la maison parentale.
Les événements liés à l’insurrection
de janvier 1863 ont marqué profondément l’esprit
du jeune artiste. A l’orée de sa carrière
artistique Jacek Malczewski puise l’inspiration dans les
traditions patriotiques et aborde la thématique nationale.
En effet, ses premières toiles dévoilent bien clairement
ses préférences : des scènes et des sujets
historiques liés au thème du martyre Polonais.
Durant
son séjour à Paris, Malczewski a du mal à
nouer des contacts avec des artistes en vogue, parler des nouvelles
tendances de l’art, converser sur le primat de la couleur
et de la forme, de l’impression placée au-dessus
du thème.
Et c’est justement au bord de la Seine, qu’il commence
à créer des tableaux en puisant l’inspiration
dans la poésie de Slowacki, là Malczewski s’impose
comme «un poète de la peinture et le peintre de la
poésie».
Il commence timidement à illustrer «Lillia Weneda»
et «Mazepa». Puis, il s’intéresse au
poème
«Anhella» et à son héroïne principale
Ellenai qui apparaît fréquemment dans son œuvre
p.ex. «Smierc Ellenai» (la mort d’Ellenai) possède
plusieurs versions, la plus connue étant celle qui a vu
le jour en 1883 et qui a apporté à son auteur une
certaine célébrité. Le drame se déroule
dans une pièce sombre et austère. L’artiste
prend soin de présenter la rude réalité en
utilisant des couleurs brun, or avec le rehaut de blanc. Il respecte
scrupuleusement la conception réaliste de la scène
mettant l’accent sur chaque détail.
Malczewski
trouve aussi une source d’inspiration dans l’œuvre
littéraire de Teofil Lenartowicz intitulé «Cienie
Syberyjskie» (Ombres sibériennes), et dont le devise
«Syberia to pieklo – w piekle nie moze byc gorzej»
(Sibérie s’est l’enfer – dans l’enfer
cela ne peut pas être pire) a frappé l’imagination
et la sensibilité de l’artiste. Malczewski reprend
les motifs de
ce livre et montre sous les lumières différentes
les conditions de vie des prisonniers. Dans une série de
tableaux «Niedziela w kopalni» (1882), «Na etapie»
(1883), «Na etapie Sybiracy» (1890), «Sybiracy»
(1891), Smierc na etapie» (1891) ou «Wigilia na Syberii»
(1892). Ce dernier tableau représente avec une acuité
remarquable le sort des prisonniers le jour du Réveillon.
Le réalisme de cette scène oscille vers l’expression
symbolique de ce groupe des gens réunis autour de la table
couverte d’une «nappe blanche» en l’occurrence
un bout de chiffon. Les brins de la paille s’en dégagent
pour rappeler le moment de fête. Les personnages pensifs,
têtes baissées au – dessus des assettes vides
et la table garnie de quelques morceaux de pain noir nous incitent
à la réflexion. La palette simplifiée, au
dominant de couleurs brun et gris souligne, tout simplement, le
sort tragique de personnages et la misère de leur cellule.
La lumière de la bougie et la blancheur de la nappe éclairent
à peine leur dure réalité.
Une
autre œuvre de la série patriotique et également
confirmant sa position du peintre symboliste arrive en 1894 «Melancholia»
décrit par l’artiste comme «Prologue»,
«Vision», «Tout un siècle». Il
y transcrit sa réflexion sur une centaine d’années
d’histoire de la Pologne, de son indépendance perdue,
ses insurrections réprimées et des déportations
qui les ont suivies.
De temps
en temps, Malczewski s’évade dans le monde imaginaire,
fantastique, habité par des chimères et des
faunes. En 1888 Malczewski peint une série intitulée
«Rusalki», les héroïnes expriment l’allégorie
des rêves, des illusions nées de l’imagination
de jeune homme. «On i ona», «Opetany»,
«Dziwozony», «Boginka w dziewannach»,
«Zalaskotany». Malczewski trouve de
nouvelles
inspirations dans la poésie de Teofil Lenartowicz. Il s’intéresse
aux anges ailés. De cette inspiration sont crées
«Aniele pojde za Toba» et le triptyque «Za aniolem».
Malczewski aime peindre par cycle et son thème le plus
important «Thanatos» (1898-1923) est consacré
à la mort. Le triptyque «Moj pogrzeb» achevé
six ans avant la mort de l’artiste s’approche par
son atmosphère aux «Serres chaudes» de Maurice
Maeterlinck. La mort chez Malczewski est présentée
en tant qu’une belle et charmante femme toujours entourée
des fleurs ou buissons en fleurs. Dans les autoportraits de l’artiste
elle est son compagnon fidèle et bien présent.
Le thème auquel Malczewski a consacré plusieurs
toiles est «Polonia». En 1897 dans «Natchnienie
malarza» apparaît une femme mal habillée avec
une couronne de paille accrochée au dos et tenant dans
la main une bulle de savon. En 1903 elle est fatiguée et
accompagnée des deux enfants. L’année de la
première guerre mondiale elle prend forme d’une belle
femme, rejetant son sac de pèlerin de son dos, elle garde
une couronne or et une draperie blanc et rouge. Quelques années
plus tard elle se transforme en «Nike Legionow» menant
des soldats au combat et en 1918 Polonia - une allégorie
de la Pologne en couronne, faisant tomber des épaules une
écharpe sibérienne et nettoyant des blessures creusées
par des menottes.
L’artiste
excelle dans l’art de portraits. Il peint des personnages
célèbres comme Adam Asnyk, Wladyslaw Reymont, Stanislaw
Witkiewicz et beaucoup d’autres. Une quantité importante
d’autoportraits méritent une attention particulière.
Très souvent il est accompagné d’une muse,
de faune, de chimère, «Autoportret z Muzaé
(1906), «Autoportret z Tobiaszem i pakami» (1912),
«Autoportret w bialym stroju» (1914). Dans ses dernières
œuvres l’artiste récapitule les différents
courants de son art. Il nous permet de découvrir la dualité
du monde extérieur et symbolique.
Aleksandra
avec l'aide précieuse de
Kat